Jouer, Rêver, Guérir… Cancer du sein et Art-thérapie

Jouer, Rêver, Guérir

 Un témoignage de Viva Iny

Viva Iny est psychothérapeute -psychanalytique et travaille auprès des populations migrantes au Québec. Elle a été formée à l’Ethnopsychiatrie et à la Clinique Transculturelle de l’Ecole de Bobigny  (Pr Marie Rose Moro)

Cet article concerne l’expérience  subjective que constitue le cancer du sein. Comment traverser cette maladie sans séismes psychiques, sans exclusion sociale et sans stigmatisation ? Comment maintenir son courage et sa créativité ? Comment ne pas se dérober face au réel, et ne pas se laisser écraser par la maladie ? Comment réaffirmer que le soi demeure, et ne deviendra pas un esquif balloté par la peur, la douleur et la démission ?

C’est en jouant et seulement en jouant que l’individu, enfant ou adulte, est capable d’être créatif et d’utiliser sa personnalité toute entière.  C’est seulement en étant créatif que l’individu découvre le soi. De là, on peut conclure que c’est seulement en jouant que la communication est possible…” (D.W.Winnicott, 1975). Ce grand psychanalyste nous rappelle l’importance de l’activité ludique qui favorise la croissance, l’intégration psychique et, par là même la santé. La créativité favorise une prise en compte personnelle de la réalité extérieure, plutôt que simplement de la subir, en générant un espace intermédiaire qui mêle réalité psychique et réalité extérieure. L’art thérapie, par sa nature ludique, devient un espace transitionnel, où l’acte créatif de l’individu permet à celui-ci de réaffirmer son existence comme sujet de sa liberté et non comme simple corps victime de cancer. Dans le cas des femmes atteintes d’un cancer du sein, cet espace transitionnel permet de jouer avec les différentes réalités extérieures jusqu’à atteindre une cohérence relative de leur monde interne, jusqu’alors bousculé par les traumatismes  liés au cancer. La valeur de la thérapie par l’art repose donc essentiellement sur la possibilité qu’elle offre de mettre en fonction un processus réparateur. Les ateliers s’articulent autour de différents moments (le passé, la vie avant le cancer, le vécu, le futur) et aide les femmes à établir une continuité entre ces différentes étapes de leur vie en attribuant un sens à l’expérience vécue.  Les aspects psychiques  plus difficiles à cerner, qui sont liés au désir, à l’estime de soi, aux troubles de l’identité et de l’identification, au maintien de la pulsion de vie sont aussi abordés. La production d’art devient ainsi un pont entre l’avant et l’après de la maladie,  en actualisant  ces indispensables mouvements d’allers et de retours entre l’histoire antérieure et les préoccupations actuelles de la  femme au sein et de cet  espace transitionnel et de la dynamique groupale.

L’annonce du cancer est d’abord vécue  comme un séisme, un coup de tonnerre dans un ciel serein. C’est l’image d’un chaos au sein des cellules, d’un soudain désordre dans le cours de la vie. « On a perdu l’innocence du corps » (Clavreul, 1978). En effet, c’est l’identité qui est menacée.  Plus tard, au cours de la maladie, la perception de soi  sera remaniée (les traitements, les opérations mutilantes, les altérations physiques, la perte des cheveux, des cils et des sourcils), mais  par-dessus tout, l’identité est menacée. Le corps  à ces instants là, devient la totalité de l’identité, si l’on peut dire. Il en est le garant, le siège, la manifestation. Or le corps est attaqué,  « L’angoisse est au cœur du soma », figurée par le cancer, elle altère ce sentiment de continuité de soi (Winnicott, 1958), ce sentiment d’être soi-même, ce fil retissé en permanence entre notre monde interne et l’impact avec la réalité.

Suite au trauma initial de l’annonce du cancer et de sa présence irréfutable  l’expérience peut devenir et pour moi elle devint un voyage initiatique. Au départ, le trauma est conçu en tant que processus de métamorphose, plus précisément,  un phénomène à la fois structurant,  destructeur et constructeur. Cette conception se distingue de la vision médicale classique associant uniquement le trauma à un vécu débilitant et handicapant. Par exemple, comment vais-je surmonter cette grosse fatigue émotionnelle suite aux traitements ? L’angoisse de la mort me rend hyperactive. Je vis intensément, je roule à cent mille à l’heure. Cette course folle vise à évacuer l’angoisse et toute complexité dans la mesure ou celle-ci me confronte inéluctablement à la souffrance et à la mort. Je ne goûte plus à la vie. Il faut ralentir mon rythme sinon je risque de m‘effondrer. Lire le reste de cet article….

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A lire…absolument

 Michèle Lajoux

Le roman « Puisque c’est ça la vie » de Michèle Lajoux aux Editions du Cherche-Midi raconte avec beaucoup de sensibilité et de lucidité l’histoire d’une petite fille, Angeline, qui vit à Laon et en vacances à Aix en Provence, puis y grandit entre Irène, une mère hostile au coeur de pierre et Jean un père faible et irascible, le tout au milieu d’une famille bourgeoise étriquée et pleine de contradictions et de secrets.

 Dans ce roman certes féminin mais que les hommes liront avec intérêt, le lecteur vit les frustrations et les infimes petits bonheurs d’Angeline, très fine observatrice de sa propre existence d’enfant qui « joue à ne pas être née » et qui court après l’amour impossible de sa mère, qu’elle envie, admire et qu’elle hait en même temps. 

 Un court extrait pour vous donner le ton : 

 « Angeline se dit qu’Irène n’as pas de chance, elle pourrait être la mère d’une jolie petite fille, un peu potelée,une brune aux cheveux frisés, aux yeux verts et au teint de lait. Une fille qui lui ressemblerait et qu’elle aimerait, pas une moche blondasseaux cheveux raides et au teint blafard, aux yeux bleus, et maigre, beaucoup trop maigre. Enfant, Irène aurait pu doubler Shirley Temple. Sur les photographies qu’Angéline admire en secret, la fillette, puis la jeune fille se promène d’image en image, épanouie, souriante, sportive en jupe plissée courte…[…]… Angeline contemple les photos, elle scrute les visages, épie, recherche une toute petite similitude entre les traits de sa mère et les siens. Si elle réussit à lui ressembler un peu, seulement un tout petit peu, Irène se risquera-t-elle à l’aimer d’un tout petit amour? » p.198

 Le style de Michèle Lajoux est vif, les mots concrets choisis avec attention, les êtres et les lieux décrits avec cette pertinence du ressenti. On ressent qu’Angeline dissimule constamment ses affects à sa famille mais l’auteure réussit à nous les faire activement partager par ce dialogue intérieur sans sacrifier au pathos (voire au sordide de bon ton) auxquel nous habituent trop souvent d’écrivains bien installés.

Je ne peux que penser à Nathalie Sarraute (Enfance 1983,  Tropismes, 1939, 1957)non pas pour le style de Michèle Lajoux qui est nullement abstrait mais pour une certaine manière d’agencer des moments encore tremblants de vie suspendue d’une enfance solitaire. Comme Sarraute, Michèle Lajoux traduit son langage intérieur avec une grande lucidité et on imagine Angeline, laissée pour compte, mal aimée, regarder ceux et celles qui s’agitent autour d’elle comme s’ils n’étaient plus les siens, se construire un moi fort et grandir, en dépit de tous, comme un papillon qui n’aurait jamais été chenille.

Guy Lesoeurs

Futurs managers… le pied à l’étrier

IMGP2222Depuis 1991, j’anime des programmes pour étudiants qui, en fin d’études et en alternance  (Faculté de pharmacie, cursus MOI²SE, directeur Pr Sylvette Huichard) en master (comme le MIP de l’ESC Dijon, Directeur Pr Céline Soulas), se destinent aux industries des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux etc.).

On ne naît pas « manager », on le devient, en exploitant et façonnant sa valeur intrinsèque ; c’est pourquoi il est nécessaire, d’abord, de travailler sur l’état d’esprit. Mes programmes à base de réflexion et de mise en situation sont conçus pour aider les futurs managers ( le mot « étudiants » est banni) à mieux se connaître, prendre confiance en soi, de manière authentique et non surfaite, à construire sa propre stratégie et sa promotion (eh oui!) en prenant conscience sans concession de leur potentiel, en développant sa créativité et son  charisme. Les participants au programme intitulé « Conquérant de soi, respect de l’Autre » doivent aussi s’initier au travail en équipe en faisant adhérer leurs collègues et en transformant leurs idées en projets concrets…

Programme ambitieux? Certes, mais combien il s’avère nécessaire. Cette étape de « pré-entreprise », vécue comme un lieu expérientiel sans enjeu autre que la réussite de soi-même, est essentielle à réussir avec les bons ingrédients pour partir du bon pied. Combien de managers que je suis aujourd’hui en coaching regrettent de ne pas avoir eu ce pied à l’étrier!

A suivre…

Guy Lesoeurs

Au fait, futurs managers, je vous signale le site Jobteaser, co-fondé par un jeune et dynamique entrepreneur, Adrien Ledoux qui a eu l’idée -géniale- de rendre service aux étudiants en leur donnant une vision en temps réel des entreprises …de l’intérieur avec un tas de services associés! www.jobteaser.com

 

Guy Lesoeurs

La persévérance…clé de la vie

tableau de Jean Jacques Marie

tableau de Jean Jacques Marie

Jean Louis Etienne, émission TV Thé ou café  www.the-ou-cafe.france2.fr , de dimanche matin à 7h50. Catherine Ceylac laisse 60 secondes à Jean Louis Etienne afin qu’il nous dise en direct et sans interviewer ce à quoi il croit.

Jean Louis Etienne choisit un seul mot :  » persévérance ». Pour lui, il y a tant de choses inachevées dans une vie, tant de rêves abandonnés et perdus que, insidieusement, chacun de nous peut accumuler de la frustration qui empêche progressivement d’avancer et d’accepter de nouveaux défis. Ainsi, JL Etienne www.jeanlouisetienne.fr nous recommande, par exemple, de terminer le petit avion modèle réduit que l’on a commencé il y a dix ans et dont la maquette est au grenier.

Belle leçon, Jean Louis et merci. Je vais de ce pas faire la liste de ce que j’ai laissé en suspens et délaissé. A quoi bon la  fuite en avant si c’est pour faire de l’ à peu près, du vite fait alors que j’ai laissé en jachère un poème, un roman, un dessin ou un collage dans un carton.

Je vais de ce pas rappeler trois choses à mes amis les futurs managers que je coache en développement personnel:

1. Faites peu de choses mais faites les à fond et bien.

2. Ne laissez rien en jachère.

3. Exercice : exprimez en 60 secondes ce à quoi vous croyez en choisissant un mot-clé et dites pourquoi c’est important pour vous. Ainsi vous serez prêt en toute circonstance (1 minute dans un ascenseur ou dans un couloir) pour passer un message fort et motivant à votre futur patron ou à un collaborateur. Vous ferez ainsi la différence

Guy Lesoeurs 

Le tableau de Jean Jacques Marie, peintre talentueux de mes amis, montre un chemin qui commence doucement sur terrain plat et qui monte vers les rochers des Baux, forteresse à quelques pas de chez moi. La particularité de ce tableau est que Jean Jacques a si bien réussi l’effet de perspective que l’on peut y entrer et marcher sur le chemin. Mais il faut pour cela y engager sa tête pour réussir sa quête. Attention au syndrome de Stendhal…

Syndrome de Stendhal : nom donné au trouble psychosomatique que Stendhal a éprouvé à Florence au sortir de l’Eglise Santa Croce à savoir une émotion subjuguante devant la beauté d’un tableau. Graziella Magherini auteur de » La sindrome di Stendhal « , éditions Ponte alle Grazie, 1996, nous confie :  » Nous sommes tous porteurs du syndrome de Stendhhal. Ce phénomène reste pour la plupart d’entre nous diffus. Dans certaines conditions d’intimité, une oeuvre d’art fonctionne pour celui qui la regarde comme le symbole d’un drame intérieur « . Il ya aussi le film du même nom de Dario Argento en 1996.

Faut-il un débat sur l’identité nationale ? M. Rocard au Nouvel Obs

Soleil déclinant sur la merL’identité nationale est au goût du jour…

De mes lectures, je vous livre des extraits des propos de Michel Rocard sur ce sujet… frappés au coin du bon sens. (tirés du nouvelobs.com). Serions nous, comme les Mayas au crépuscule de notre histoire alors que notre nation s’enorgueillit d’être un creuset socio-culturel? Pour moi, la question de l’identité nationale est un vrai faux débat. C’est comme si, tout d’un coup, je prenais conscience d’être vivant…

Michel Rocard : -….[…]…La France est incontestablement l’un des pays occidentaux qui a la plus forte identité nationale…[…]…
….Tout cela nous donne un art de vivre ensemble, parfois avec une assez grande indifférence au droit du sang, et donc une majoration de l’identité de choix de culture et de volonté d’un destin commun, largement façonné par la Révolution. Et tout cela est assez magnifique. On a même fait vivre cette identité à la Martinique, à la Guadeloupe, au Sénégal et à dans presque toutes nos colonies.

L’idée que tout cela fasse doute et qu’il faille en rediscuter me stupéfie. Cela fait une identité absolument merveilleuse, dont il est vrai qu’on la durcie quand on la prend comme Le Pen. Parce que Le Pen, au fond, nie la réalité de l’adhésion à cette nation de gens qui y sont depuis 150 ans. Ma mère était Savoyarde. Ce qui veut dire que moi-même, je dois d’être Français à un succès diplomatique de Napoléon III, tandis que pour Le Pen, je suis un Rital.
Cela ne me fait pas plaisir de rouvrir la conversation. Je trouve ça complètement imbécile. Il faut bien voir que cette logique de fabrication de la France se détruit si on la ferme. C’est une logique d’ouverture. La France se définit comme une sorte d’orgueil permanent. Moi je suis protestant. Cela veut dire que mes ancêtres sont considérés comme Français depuis ce jour mystérieux d’août 1789 où l’Assemblée constituante a fait citoyens français successivement les protestants, les juifs, les comédiens et les gens de couleur.
Dans l’idée d’arrêter ce mouvement de générosité, il y a quelque chose qui me choque. Parce qu’ouvrir le débat, c’est rechercher l’écriture d’une formalisation instantanée de la description de ce qu’est l’identité française. Or, elle a été dans l’histoire complètement évolutive. Et après tout, si on décide que c’est à la date du 3 août 1789 que s’arrête la fabrication de la France, moi je cesse d’être citoyen.

N’est-ce pas aussi la question de l’immigration qui est sous-entendue dans le débat sur l’identité française ?
– La France est depuis le milieu du XIXe une terre de dépression démographique. Il y a avait vers 1935-36 déjà 4,5 millions d’étrangers en France. Et la presse de l’époque montre que certaines couches de la population traitaient les immigrés – Italiens, Polonais, Belges…- comme des chiens. La presse d’aujourd’hui n’ose pas, s’agissant des Arabes ou des Noirs, reprendre le vocabulaire, les insultes et les présupposés que colportait la France entre les deux guerres. Tous ces hommes sont devenus citoyens français. La France est faite comme ça! Se poser le problème de l’immigration, c’est se poser la question de la date à laquelle s’arrête la bienvenue que nous avons souhaité à tous ceux qui sont devenus Français en venant d’ailleurs, et qui sont aujourd’hui un bon tiers, sinon la moitié, de notre population totale. Alors à partir de quand on crache dessus ?

Exalter la France est une chose. Je me sens Français comme pas possible. Je suis éperdument fier d’être par hasard né dans ce pays. Mais je n’ai pas envie que la chance que cela représente soit fermée à d’autres, au nom d’un sectarisme qui n’est pas dans notre histoire. Et je crains beaucoup que le fait d’ouvrir le débat ne se traduise, comme souvent en France, par une volonté de formaliser, de décrire et de mettre dans des textes, ce qui va figer. C’est idiot… C’est idiot parce que je n’ose pas caresser l’espoir que dans ce débat sur l’immigration, la victoire aille à cette définition : la France est la seule identité nationale au monde qui soit en définition évolutive et constamment en train d’agglomérer de nouvelles sensibilités et de nouvelles représentations linguistiques ou de couleurs de peau.

C’est votre définition ?
– Oui. Absolument. En 1789, les Français secouent le joug de la monarchie absolue. Les trois ordres se réunissent, ils écrivent la déclaration des Droits de l’homme et du citoyen, et il ne leur vient pas à l’idée de n’écrire que pour eux. Ils écrivent pour le monde entier. Les deux premiers mots sont « Les hommes« , sans distinction géographique, linguistique ou raciale. « Les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. »
C’est un trait culturel. Et toute idée que le cadeau de la France au monde qu’est ce texte puisse être terni, par le fait qu’on donnerait plus d’importante à certains hommes qui sont rassemblés dans l’hexagone sur certains autres, c’est un attentat à la grandeur de la France.
…[…] …
Ma crainte, c’est qu’on mette des frontières là où il n’en faut pas. C’est que parler de l’identité nationale nous convainque qu’il y a une substance de plus, quelque chose de qualitativement différent, entre ceux qui sont Français et ceux qui ne le seraient pas mais habiteraient quand même notre territoire. C’est ça le risque. Car l’enjeu, c’est une insertion décente de tous ces gens, comme nous l’avons toujours fait.

Propos de Michel Rocard recueillis par Baptiste Legrand
le lundi 2 novembre 2009 – Nouvelobs.com